Entraîneur des Espoirs du Paris Basketball, Raphaël Desroses va poursuivre sa troisième saison avec le centre de formation parisien. Le natif de Melun explique le contexte très particulier dans lequel il évolue depuis son arrivée au club, et la politique sportive qu’ils ont dû appliquer, bien différente des autres. Homme de passion, et dévoué à son amour pour le basket, il revient sur son métier de consultant et ce qu’il aime le plus dans ce rôle.
Arrivé à l’été 2022, la première saison est très compliquée, la dernière est un peu mieux. Est-ce un point sur lequel vous avez échangé avec les dirigeants pour développer le centre de formation parisien ?
Les dirigeants ont changé, Christophe Denis est arrivé très tardivement lors de l’intersaison précédente.
En arrivant, j’ai dû faire avec ce que l’on m’a donné. La première année, c’était pour prendre la température. Sans négliger le travail qui a été fait avant, il y avait beaucoup à faire.
Ce n’était pas évident puisque quand le club est arrivé, il commence en Pro B, ensuite il y avait le Covid. Le Paris Basketball est un club qui grandit tellement vite qu’il n’y avait aucune chance pour le centre de formation d’avancer à la même vitesse. Il a fallu devenir un centre de formation dans un premier temps.
Paris est d’une logistique particulière, plus dure qu’en province. Avec les anciens dirigeants, il a fallu faire un centre de formation quasiment sans logement.
Sur ma première année, il n’y avait que quatre joueurs hébergés pour l’équipe U18 et U21.
Quand on est parisien et qu’on nous demande de rester à Paris, mais de prendre le risque d’avoir des trajets rallongés, même à 10 kilomètres ou de partir en province et d’être hébergé et nourri, un tas de joueurs s’en vont, et nous ne sommes pas les premiers choix.
Il y avait 27 joueurs à l’époque au centre de formation sur les équipes U18 et U21 avec des infrastructures qui ne permettaient pas d’en accueillir autant.
On avait 17 joueurs dans notre équipe Espoirs, chaque semaine, je devais dire à 4 ou 5 qu’ils ne joueraient pas.
Il fallait qu’on réduise un peu l’effectif, sur les deux équipes, on est passé de 27 à 20 joueurs. Ce n’était pas encore exactement ce que je voulais, mais le travail était déjà plus cohérent. Ce n’était pas l’embouteillage chaque week-end juste pour remplir la feuille de match et j’ai pu créer une équipe.
Sur la première année, si je prends l’exemple des joueurs stagiaires, je savais seulement la veille s’ils joueraient avec moi. D’une semaine à l’autre, je ne savais jamais s’ils seraient présents. Cette année, ce n’est pas comme ça, il y avait un groupe Espoirs.
On a commencé à faire venir des jeunes talents, mais par le bas. C’était compliqué de recruter un jeune et de lui dire qu’il fera le banc avec les pros, avec une équipe première aussi cotée. On s’est concentré sur la génération 2008, Ilian Moungalla nous a rejoint en sortie de l’INSEP.
L’année dernière, on avait une équipe U15 France, et c’est aussi une étape importante.
Avec l’arrivée de Christophe Denis, on a pu mettre en place notre vision du centre à court et moyen terme, qui est de rajeunir ce centre de formation. Sur cette tranche d’âge, on ne pouvait pas lutter avec les autres, mais on avait tout intérêt à proposer aux talents de jouer plus vite qu’ailleurs. On accompagne les gamins par étape jusqu’à les emmener au niveau Espoirs.
Cette saison, on a deux joueurs U15 d’âge qui ont commencé la saison avec les U18 et qui étaient avec nous sur toute la préparation. Ce sont Keelyan Nzapakete et Isaac Ramphort qui sont très talentueux, et avec qui on veut brûler les étapes dès que possible.
On a plusieurs joueurs en double projet amenés à jouer en U18 et en U21 comme Swann Penda, Karl Kouame, fraichement médaillé avec l’équipe de France U16 cet été. On a aussi Melvyn Vounang, il y a toujours Ilian Moungalla, il y a aussi Noam Delag. Je pense aussi à Dimitri Azema.
Notre but, c’est d’amener de la performance à ces joueurs qu’ils puissent déjà performer en U21 prochainement et avoir un vrai rôle.
L’arrivée de Christophe Denis est un bon coup pour la formation, sentez-vous que le club cherche à mettre l’accent dessus ? Quel est le projet concret de la formation à Paris ?
Aujourd’hui, le centre de formation n’est pas une priorité. Le combat de Christophe et moi, est de faire comprendre que l’on peut avoir un projet cohérent.
Souvent, les centres de formation sont perçus comme une charge que comme un moyen de bonifier son club. Il y a des clubs comme Cholet qui a su tirer parti de sa formation. Cela leur permet de nourrir leur effectif professionnel. Quand il y a des gros coups comme Tidjane Salaün qui part en NBA, c’est super. Il y a un modèle qui permet de faire de la formation à haut niveau et d’en tirer des bénéfices en termes d’image.
Cela demande un investissement de base. Aujourd’hui, avec Christophe, on cherche à montrer cet intérêt autour de la formation. Le vivier parisien est super intéressant.
Si aujourd’hui, on arrive pas à avoir tous les joueurs que l’on cible, c’est parce que l’on n’arrive pas à proposer à tout le monde autant.
Aujourd’hui, il y a beaucoup de places au logement, même si on doit être plus sélectif que les autres clubs. Le pacte de cette année était d’avoir la structure d’entraînement à proximité des logements. On fera notre rentrée sur une annexe de l’Adidas Arena, juste en face de ces logements, c’est une étape aussi.
La saison passée, on était parfois à Carpentier, d’autres fois au One Ball où l’on avait des conditions de travail excellentes mais compliquées à gérer pour les joueurs. Cette année, on aura un trajet piéton pour nos joueurs et proche des établissements scolaires. On grandit aussi chaque année, et c’est le plus important.
Le projet sportif est de faire très jeune. C’est le chemin choisi, on va essayer de faire dans la précocité et de donner des minutes et des responsabilités très rapidement.
“Amara Sy a été d’une grande aide.”
Vous avez formé Killian Malwaya et Mohamed Diawara, qui jouent en Pro B et en Betclic Elite. Dans cette équipe 24-25, vous voyez des joueurs au même potentiel ?
Je suis curieux de voir ce que cela aurait donné avec Killian et Mo’ dans le contexte actuel. Je pense que l’on aurait fait un bien meilleur travail avec eux.
À l’époque, le cadre que l’on pouvait leur offrir était très compliqué. On se retrouvait avec deux gamins habitués à un contexte professionnel. Ils ne font aucune préparation et ils se retrouvent en Espoirs. On avait des créneaux de N3 pour s’entraîner avec les Espoirs, c’était compliqué.
L’année dernière, c’était un meilleur cadre. Cette année, pour la première fois, j’ai pu travailler avec un staff quotidiennement.
Aujourd’hui, les entraînements U18 et U21 sont pareils, on a resserré le groupe.
Pour répondre à la question, on a Swann Penda qui est imposant puisqu’il a grandi d’un coup et qui est super intéressant. On essaye de le secouer pour qu’il explose. Karl Kouame fait partie de ces joueurs, Melvyn Vounang aussi. Ilian Moungalla est un joueur très intéressant, c’est un meneur de jeu qui mesure 1m98, c’est un fort potentiel. S’il a la bonne mentalité et l’éthique de travail, il est amené à jouer au très haut niveau.
Isaac Ramphort ne démérite pas face à des joueurs plus âgés d’un an ou deux. Keelyan Nzapakete en fait partie aussi.
Du talent et du potentiel, on en a, et on met tout en place pour les faire monter.
Amara Sy a été d’une grande aide aussi. Il a facilité nos venues, il a mis un pied sur le centre de formation, il va dans le même sens que nous.
Vous avez aussi une autre casquette, celle de consultant. En quoi ces deux métiers se lient ? Qu’est-ce qu’il vous plaît dans ce rôle ?
La passion du basket et le fait de vivre le basket d’une manière ou d’une autre.
Cela m’a toujours passionné. Ma transition s’est faite sereinement car j’étais encore au contact de ce que j’avais connu pendant tant d’années.
Je suis un passionné de basket. Regarder les matchs est un plaisir, que ce soit en NBA, en Euroleague ou en Betclic Elite.
Quand je commente un match, c’est spontané. C’est une autre passion. Il y a un A et un B. Choisir un idéal serait compliqué.
“À salaire égal, je choisis le métier de consultant.”
Je regarde beaucoup d’émissions aussi donc j’ai mes références américaines et françaises. À l’époque, quand j’ai mis les pieds à RMC, j’ai eu la chance de connaître des gars avec un peu de bouteille (rires) comme David Cozette. Je travaille beaucoup plus avec Canal + Afrique depuis un moment. Je commente des matchs NBA pour Canal International et c’est l’occasion de travailler avec des journalistes différents mais enrichissants.
De la même manière que l’on connaît ses classiques, en rencontrant un journaliste ou un consultant, j’aurais le même oeil comme les shows sur ESPN ou TNT.
Je connais aussi bien mes références basketballistiques que journalistiques.
Je m’endors tous les soirs avec un podcast, ce qui me permet d’être très au fil de l’actualité.
Regarder tous les matchs de basket, c’est difficile mais je suis quand même. Cela fait six ans avec les gars de l’Équipe, de RMC, de Skweek, de faire en sorte que l’on reste au point sur tout ce qu’il se passe.
J’ai pu faire des piges pour l’Équipe ou France 3 en étant présent en plateau.
Malheureusement, je n’ai pas réussi à faire quoi que ce soit aux J.O. C’était une torture, et en tant qu’ancien joueur professionnel, on garde l’instinct de compétiteur donc en voyant les autres, on se dit qu’on aurait pu le faire.
J’aurais aimé participé de l’intérieur aux Jeux. J’ai aussi mes billes sur le 3×3, j’ai fait des piges à RMC pour cette discipline. Je commente depuis plusieurs années les finales d’OpenFrance en 3×3
Laquelle vous passionne le plus ? Pensez-vous pouvoir continuer à alterner entre ces casquettes plusieurs années ?
La chance que l’on a dans ce métier, c’est que l’on peut faire les deux.
Si on me promet un contrat de 10 ans comme Charles Barkley je choisis le métier de consultant (rires).
Ce métier demande d’être à l’aise en prenant la parole en public, ne pas forcément être timide. J’ai la chance de pouvoir parler pendant des heures (rires).
Une fois que l’on a ces pré-requis et de connaître notre sport et d’être passionné, c’est plus facile. Il y a du boulot et plus que ce que l’on croit, mais c’est plus simple.
Être coach dépend de tellement de choses. On dépend d’un budget, d’un contexte, d’un recrutement, un peu comme lorsque l’on est joueur.
Si on est un bon consultant et que l’on est lancé, on est tranquille. L’avantage d’être consultant, c’est que tu ne perds jamais (rires). Il n’y a pas de pression de résultats et on tombe parfois sur des duos qui donnent un vrai plaisir.
À salaire égal, je choisis le métier de consultant lorsque l’on a les pré-requis.
Crédit photo : Kuratiano / RMC Sport / D.R