Cette saison, Djibril Diawara est l’homme fort des Espoirs de Fos Provence. Ayant découvert le haut niveau en N2 à Tremblay-en-France, il domine le championnat U21 à son poste. Amoureux du beau jeu et des tactiques, ce jeune meneur ne demande qu’à profiter de sa passion. Il se livre sur sa vision du basket, ses espérances pour l’avenir et tranche entre la NBA et l’EuroLeague.
Depuis ta première titularisation cette saison, tu enchaînes les grosses performances. Comment s’est fait le déclic ?
Il n’y a pas vraiment eu de déclic. J’ai juste eu le besoin de m’adapter car l’année dernière j’évoluais en Espoirs Pro A. Ce sont deux championnats différents. Cette année, j’ai également eu un nouveau coach (Miroslav Dobrican), donc ce sont deux visions du jeu différentes. Il y a eu beaucoup de choses que je ne connaissais pas, il a fallu que je m’adapte au nouveau coach et à son style de jeu. Au départ, je n’étais pas titulaire car il voulait voir les autres joueurs, tester certaines stratégies avec eux, et apprendre à les connaître, car il y en a certains qui n’étaient pas là avant. Je ne l’ai pas mal pris du tout, il n’y a pas de rancunes. Depuis que je suis titulaire, je me sens beaucoup plus à l’aise dans mon jeu. J’ai trouvé le rythme avec le coach et mes coéquipiers afin de faire de belles choses, marquer des points, faire des passes et faire les stats que j’ai aujourd’hui. On gagne aussi, et c’est le plus important.
Cela signifie que tu n’adhérais pas à la philosophie de jeu de ton ancien coach ? Ou que tu n’étais pas dans ses plans ?
Honnêtement, je pense que j’étais dans ses plans, parce que c’est quand même lui qui a voulu que je signe ici et j’ai fait des détections. Donc, je pense que je faisais partie de ses plans et que j’avais un bon rôle dans l’équipe.
Il y a des choses qui ont été dites, des choses qui ont été annoncées, qui n’ont pas forcément été respectées, je n’ai pas senti l’importance que je pensais avoir. Malgré cela, je continue à faire des bonnes performances. Il y a eu des bons matchs, des trous, et des moments où j’étais très bien.
Mais je n’ai pas été exploité avec tout le niveau que j’avais les saisons passées. J’ai joué exclusivement 2 l’année dernière. Très peu au poste 1.
Mais aujourd’hui, je suis à 100% au poste 1, et je peux jouer au poste 2. Mais la plupart du temps, je joue meneur, et c’est le poste où je suis plus à l’aise, où je m’exprime le mieux. Je peux faire le plus de passes possibles, créer mes propres tirs. Donc je pense juste qu’il y a eu un malentendu. Je n’étais pas forcément au poste où j’étais le plus à l’aise ou le plus efficace.
Tu as grandi à Tremblay-en-France, as joué en U18 et en N2 dans le club de la ville. Le jeu et les attentes étaient plus fortes selon toi en N2 par rapport au championnat Espoirs ?
Oui, la N2 est plus forte que le championnat Espoirs Pro A. Malgré que chez les Espoirs, il y ait deux équipes qui étaient très fortes, et je pense qu’ils avaient largement le niveau N2, haut de tableau. Tout le reste, je dirais qu’on avait le niveau N2 bas de tableau. À Tremblay, c’était totalement différent. J’étais dans un monde d’adultes et puis ce sont des joueurs d’expérience qui avaient évolué en N1, d’autres à un plus haut niveau. C’était plus dur en N2 car l’intelligence de jeu était totalement différente. Certes, c’était moins rapide mais il fallait comprendre le jeu car c’était des joueurs d’expérience en face. Ils avaient les combinaisons pour nous mettre en échec. Au niveau physique, c’était au-dessus en Espoirs. C’était plus rapide, plus athlétique, la différence est la.
Cela ne change pas le fait qu’une équipe N2 est meilleure qu’une équipe en Espoirs Pro A, sauf peut-être l’Asvel et Cholet qui sont au-dessus au niveau de la formation.
Issu de la génération 2003, tu arrives bientôt à terme de ton cursus formateur. Ressens-tu une certaine pression par rapport à ton avenir, y penses-tu déjà ?
Bien sûr, je pense à la suite. Il me reste quelques mois avant la fin du cursus du centre de formation. J’essaye de me donner les moyens pour taper dans l’oeil d’un coach. Malheureusement, cela ne peut pas se faire tout seul. J’ai aussi des coéquipiers qui peuvent m’aider pour cela. Ça passe par des victoires, et par l’objectif du Trophée du Futur qui nous permettra d’avoir plus de visibilité au niveau collectif et individuel.
Ce n’est pas non plus une obsession. Il ne faut pas que je tombe dans une pression en me disant qu’il faut absolument que je réussisse. Je me donnerais les moyens pour réussir, mais si ça ne passe pas, tant pis, c’est comme ça. Je n’aurais pas de regrets car je sais que j’ai essayé. Je travaille à chaque entraînement, je suis assidu, donc il n’y a aucune raison pour que ça ne marche pas.
” J’en ai marre de regarder des matchs NBA. “
Dans une vidéo #OffSeason sortie il y a quatre mois sur YouTube, tu dis que ton rêve est de pouvoir vivre du basket. La différence avec les autres jeunes est que tu ne parles pas de jouer en NBA ou en EuroLeague. Pourquoi rester aussi modeste sur tes objectifs ?
Non, ce n’est pas que je ne me prononce pas dessus, disons que la NBA et l’EuroLeague, ce sont deux mondes différents. Dans un premier temps, ce que je veux, c’est découvrir le monde professionnel et vivre du basket. Je veux kiffer le basket comme il est, voyager, voir d’autres villes, jouer contre d’autres joueurs… Si j’en ai l’occasion d’aller au plus haut niveau, que ce soit en EuroLeague, en EuroCup ou en NBA, j’irais. Plus petit, mon rêve était de jouer en NBA, aujourd’hui, mon objectif c’est d’aller en EuroLeague. C’est un championnat très intéressant, je regarde presque tous les matchs. C’est beau, intelligent et c’est un autre monde par rapport à la NBA. Si j’avais le choix entre les deux, je choisirais l’EuroLeague car c’est le jeu qui me correspond le plus. C’est dans ma tête, mais aujourd’hui, je pense d’abord à évoluer dans le monde professionnel et à vivre du basket.
C’est rare de voir des jeunes qui disent préférer aller en EuroLeague plutôt que la NBA…
C’est sûr que les États-Unis, c’est le rêve. Il y a des grosses salles, de superbes ambiances etc… Mais aujourd’hui, j’en ai marre de regarder des matchs NBA, ça me fatigue. Je ne ressens pas le même plaisir que lorsque je regarde un match EuroLeague. J’analyse, j’apprends et grâce à mon coach qui est serbe, j’ai une autre vision du basket. Je vois les choses différemment. L’EuroLeague ou l’EuroCup, ce sont des championnats plus impactant pour moi.
Tu me dis que tu en as marre de regarder des matchs NBA, qu’est-ce qui te fait dire cela ?
Chaque fois que je vois les résultats, je vois que les équipes marquent 130 points, ce n’est plus du basket. Il n’y a pas de défense et c’est fait exprès par la NBA. Luka Dončić l’a très bien dit : c’est plus facile de marquer en NBA qu’en EuroLeague. Si tu veux prendre du plaisir en regardant du basket, c’est sûr que tu vas regarder la NBA car il y a beaucoup de points et d’actions. Moi, je veux regarder du beau basket et apprendre. L’EuroLeague c’est ce qu’il y a de mieux. Il y a des systèmes, des tactiques, ça défend dur, les systèmes sont analysés et travaillés pour que ce soit optimal. En NBA, il y a des systèmes aussi, mais c’est éphémère. Le jeu se base principalement sur le un contre un, et cela ne m’intéresse pas. Bien sûr qu’un bon joueur de un contre un c’est impressionnant, mais je préfère un bon jeu collectif.
Tes inspirations sont principalement des joueurs d’EuroLeague ou il y a des joueurs NBA que tu regardes aussi ?
Plus jeune et c’est toujours le cas aujourd’hui, j’ai beaucoup regardé les joueurs comme Stephen Curry ou James Harden. J’étudiais leur jeu et j’essayais de faire la même chose sur le terrain. Allen Iverson, j’ai beaucoup étudié ses mouvements et son dribble. Mais des joueurs comme eux, c’est une minorité. Il n’y en a pas beaucoup dans le monde. C’est compliqué d’atteindre leur niveau de jeu, je ne suis même pas sûr que ce soit possible d’avoir l’adresse d’un Steph Curry (sourire). En EuroLeague, je regarde des meneurs comme Facundo Campazzo au Real Madrid, Lorenzo Brown au Maccabi ou encore Mike James. Ce sont des joueurs comme eux qui me font dire que l’EuroLeague n’a rien à envier à la NBA en termes de talent.
Lorsque l’on est francilien et que l’on s’installe pas loin de Marseille, l’adaptation est particulière ? Préférence pour Marseille ou Paris ?
(Rires). On voit la différence des gens au niveau de l’accent, au niveau du comportement, ce n’est pas la même chose. On est plusieurs parisiens dans l’équipe, parfois, on a des petites blagues entre nous et ceux qui viennent du sud. Ce sont surtout les parents des joueurs qui me font rire quand j’entends leur façon de parler, les mots qu’ils emploient. J’apprends aussi des mots là-bas.
À Paris, c’est très speed et moi j’aime bien ça. Ici, ils sont en détente, le retard c’est normal pour eux (rires). Fos n’est pas une grande ville, il y a Marseille à côté, Montpellier ou Nîmes, mais je ne sors pas beaucoup. Pour le basket, ce n’est pas plus mal. Je ne suis pas déconcentré par ce qu’il y a autour, je suis focus sur mes entraînements.
Dans le foot, je suis un mec du Real Madrid. Je ne suis pas dans la rivalité Paris / Marseille. S’il y a un Classico, je préfère voir Marseille gagner. Mais, je suis surtout un mec du Real, quand ils jouent, je suis à fond.
C’est mon club. La saison de Jude Bellingham, elle est magnifique, il n’y a rien à dire (rires).
Crédit photo : Fos Provence Basket / All Parisian Games