Facteur X des Bleus aux Jeux Olympiques, Isaïa Cordinier a fait parler de lui pendant la quinzaine olympique. Pour Tribune47, l’arrière de la Virtus Bologne est revenu sur son été en Bleu à travers son rôle, son meilleur souvenir, son échange avec Melo ou encore l’intérêt de la NBA…
Comment tu as vécu les Jeux Olympiques ?
Il y a deux mots qui reviennent souvent quand j’explique ce qui s’est passé, c’est unique et spécial. Vraiment, je pense qu’en fait, on ne réalise pas forcément ce qui s’est passé encore, avoir l’opportunité et la chance de vivre ça, les Jeux Olympiques chez soi, devant sa famille, devant les fans français, c’était vraiment quelque chose de très spécial et une chance incroyable.
Le fait d’avoir fait la première partie à Lille, vous ne vous sentiez pas à l’écart ?
On avait quand même l’ambiance JO, parce qu’il y a l’atmosphère, il y a quand même les anneaux un peu partout. Après, c’est vrai que comme on n’était pas au village, même une fois à Paris, de ce que me racontaient les gars qui avaient l’habitude, qui avaient déjà participé à des Olympiades, ça ressemblait un peu plus à une ambiance de Coupe du Monde, par exemple. Mais moi, en tout cas, personnellement, j’étais quand même dedans. Franchement, même quand on arrivait sur le terrain, le parquet, il était vachement réussi, je trouve. Et puis, on sentait la ferveur française donc on était vraiment dedans. Franchement, c’était quelque chose… Les 27 000 personnes à Lille, c’était vraiment stylé. Après, le quart et la demi à Bercy aussi, c’était quelque chose, franchement, ça envoyait.
Pour revenir quelques semaines en arrière, quand tu arrives à l’INSEP pour la prépa et que vous êtes 19, t’es dans quel état d’esprit ?
Je pense qu’on était un peu tous pareils, on était là pour gagner nos places et participer à cet événement qui est un peu la chance d’une vie, de faire les JO à la maison. On était là pour gagner notre place et pour prouver qu’on pouvait apporter à l’équipe de France.
Sur la prépa, on a vu que c’était un peu plus compliqué, comment tu l’as senti sur ces premiers matchs-là ?
Je pense qu’on se cherchait en tant que groupe, tout simplement, on se cherchait, c’était quelque chose de nouveau, on voulait voir comment ça prenait sur l’alternance de nos jeux, etc. Donc je pense qu’on s’est cherchés pendant un petit moment, c’est pour ça qu’on n’était pas forcément en rythme sur la prépa, ça s’est vu de par nos résultats, même s’il y avait quand même pas mal de satisfaction et de progression. Les gens sont focalisés sur les résultats, alors qu’on a vu qu’à chaque match, on progressait quand même. Donc nous, c’est pour ça, on était toujours sûrs de nous, confiants en tout cas, on était toujours confiants dans ce qu’on pouvait proposer.
En phase de poules, c’était également compliqué. À quel moment avez-vous senti le déclic ?
Alors, le groupe, en soi, on l’a toujours eu, c’est ça qui a fait notre force. Et c’est ça qui a fait qu’on a écouté personne, qu’on n’a rien laissé rentrer dans le groupe, qu’on est resté vraiment unis et solidaires. Après, c’est après la défaite contre l’Allemagne en groupe, où on s’est réunis entre joueurs, on s’est dit les choses, on a parlé de ce qu’on faisait mal, de ce qu’on voulait faire dans cette compétition, et on s’est donné une base pour commencer avec des axes vers lesquels se diriger. Et après, on a partagé ça avec le staff sur les trois jours d’entraînement qu’on a eu entre le dernier match de groupe et le quart, et ça nous a réussi. Mais je pense que c’est le fait que le groupe, vraiment hors terrain, soit très solide, comme une bande de frères. C’est ça qui a amené à ce qu’on arrive à avoir le déclic et à développer cette alchimie sur le terrain.
D’un point de vue personnel, tu es aussi monté en puissance tout au long de la compétition. Comment s’est faite, pour toi, cette montée en puissance ?
J’essaie de toujours rester moi-même, c’est-à-dire que j’ai cette capacité d’être assez versatile, à pouvoir jouer plusieurs rôles. J’ai eu l’opportunité à un moment de pouvoir être plus impactant, surtout offensivement. Et voilà, je l’ai juste saisi en fait, le jeu est venu un peu plus à moi, j’ai saisi l’opportunité, j’ai été performant. En voyant que j’ai été performant, ça m’a donné plus de confiance, mes coéquipiers m’ont aussi poussé à rester agressif et ils m’ont donné aussi beaucoup de confiance, le staff aussi. Une fois que j’ai eu un peu de réussite, mes coéquipiers et le staff m’ont dit de continuer, ils m’ont poussé. Ça m’a donné beaucoup de confiance pour continuer à jouer mon jeu. Parce que c’est des choses que je produis assez régulièrement, sur la saison d’avant et la dernière en Euroleague avec mon club. Je savais que je pouvais apporter à n’importe quel niveau, je ne défonce pas les portes pour m’imposer, j’essaie d’être le meilleur coéquipier possible. Quand on me donne un rôle, je me donne à fond, mais si j’ai l’opportunité de pouvoir montrer plus, c’est ce que j’ai fait.
Justement, tu finis avec un rôle de facteur X. Peu de monde t’attendait à prendre autant de lumière. Comment tu l’as vécu ?
Forcément, c’est kiffant. C’est kiffant parce qu’en plus, ça va dans la vibe et dans l’énergie de l’équipe. On gagne, justement, on ferme beaucoup de bouches, pour ne pas être grossier. Il y a beaucoup de personnes qui doutaient, pas grand monde qui croyait en nous. Après, j’ai toujours eu ce sentiment d’être un peu sous-coté en vrai. Mais, ça me va aussi d’un côté parce que je suis un bosseur, je ne lâche rien. Ça va avec mon tempérament, je pense. C’était kiffant. Franchement, c’était trop kiffant parce que comme je l’ai dit, c’est collectif. Il y a une énergie folle. Il y a une émotion spéciale parce qu’il y a ma famille, il y a ma femme, il y a mon père qui a fait les JO avant moi et je performe comme ça devant lui. C’est assez spécial. C’était un moment assez cool.
Au premier rang, quand tu vois que tu as Carmelo qui est là, qui commence à se chauffer quand tu marques, comment c’était ?
Ça, c’est pour ceux qui me connaissent, mes proches, ma famille, mes meilleurs potes. En fait, moi, Melo, ça a toujours été mon joueur préféré. Du coup, c’est pour ça, je crois que c’est après l’Allemagne, je suis allé le voir, je lui ai dit que c’était mon joueur préféré all time. Je lui ai dit ‘Pour moi, performer comme ça devant toi, c’est un honneur’. C’était cool. Après, j’ai trashtalké un peu. Je lui ai dit, ‘t’inquiète, on aura les USA en finale, t’inquiète pas’. Après, je pars et c’est lui qui me reprend et il me dit, ‘on t’attendra samedi en finale’. C’était un moment assez cool pour moi. C’était un peu suspendu dans le temps. En plus, il y a eu une photo. Tous mes proches, mes meilleurs potes, toute ma famille m’ont envoyé un message direct. Ça avait une vrai signification. Ça voulait dire quelque chose.
Pendant ces Jeux Olympiques, toi, Guershon et Mathias notamment, vous avez fait parler de vous. On a vu que Guershon a signé aux Sixers. Est-ce que toi, tu as eu des contacts avec des franchises ?
Déjà pour Guershon, je suis tellement content pour lui. C’est plus que mérité. Pour moi, ce n’était pas normal qu’il n’y ait pas plus pour lui. Depuis ces 2-3 dernières années, il est plus que dominant. Je trouve qu’il y a sa place aujourd’hui. De mon côté, il y a eu un petit peu bruit. Ça fait quelques années qu’il y a de l’observation. Mais il n’y a rien eu sur la table. L’intérêt et la curiosité se sont renforcés. Ça va me donner un petit coup de pouce, on verra. Pour le moment, il n’y a toujours rien de concret. En plus, j’ai encore un an de contrat avec la Virtus.
La NBA reste quelque chose auquel tu penses pour le futur de ta carrière ?
Bien sûr. Je n’ai jamais eu la chance. J’ai été drafté. J’ai fait quelques Summer League. Je ne l’ai touché d’un orteil (rires). C’est quelque chose que j’aimerais découvrir. En tant que compétiteur, on a tous envie d’aller toucher à ce qui se fait de mieux dans le monde.
Quel est ton meilleur souvenir des Jeux Olympiques ?
Alors, j’en ai trois en tête. L’atmosphère générale du quart de finale. Le match en général, comment ça
se déroule contre le Canada. Il y a aussi le buzzer final contre l’Allemagne. Ça, je pense qu’en termes d’émotion, une fois que ça a retenti, c’est que t’as gagné une place en finale. Je ne sais pas si je revivrai ça un jour. Et le dernier souvenir, il est un peu plus perso. C’est en fait lors de la première Marseillaise. Je croise le regard de ma femme dans les tribunes. C’est avant le match contre le Brésil. Et là, c’est fort pour moi parce que je me dis que j’y suis. C’était beaucoup de fierté pour moi.
Tu as fait ton retour à Bologne. La reprise n’était pas trop dure ?
On a fait une reprise assez intelligente avec mon club. Ils m’ont fait revenir un peu plus tôt que ce que j’espérais (rires), mais une fois sur place, on a fait une reprise très intelligente suite à la charge de travail que j’ai eue cet été. On fait les choses petit à petit. Je reprends le rythme. Je prends mes marques avec l’équipe. C’est un système que je connais. Je suis là depuis trois saisons. Le coach était là l’année dernière. C’est plus facile pour moi de me mettre dans le bain rapidement.
Qu’attends-tu de cette nouvelle saison ?
C’est ma quatrième année ici. Le coach a toujours eu beaucoup d’attentes envers moi. Ça va se faire dans la continuité. Je suis toujours dans la même optique. Progresser, confirmer année après année. J’ai passé un petit step cet été. L’idée, c’est de le confirmer et d’en passer encore un pendant l’année. Le but c’est toujours d’avancer, d’essayer de progresser, d’être le meilleur joueur possible. Et de gagner le plus de matchs possible.
Comme tu disais, c’est ta dernière année avec Bologne. Est-ce que tu t’es projeté un peu sur la suite ?
Non, le plus important pour moi, c’est vraiment de confirmer et d’être la meilleure version de moi-même. C’est ça que j’aime en fait. J’aime le basket, j’aime performer, j’aime gagner. Continuer à prendre du plaisir en performant. Pour moi, c’est ça le plus important.
Crédit photo : FIBA/Virtus Segafredo Bologna